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Dessins

Jour de brume au lieu-dit le moulin

Il y a, dans les paysages que je traverse, des rencontres qui me saisissent, éveillent mon désir et accroissent mon regard, m'interrogent : Qu'est-ce que je vois ?

Qu'est-ce que je projette, et qu'est-ce que je sens ?

Qu'est-ce qui se trame,

là,

devant moi,

et si je regarde encore et encore,

qu'est-ce qui se dévoile,

apparaît peu à peu et m'interroge encore :

Derrière mon désir,

une relation se tisse peu à peu.

Quand je laisse le temps à la montagne de prendre sa place,

au regard de se poser, mes projections, mes idées de "paysage" laissent la place à une respiration...

Il faut parfois beaucoup de temps pour que le regard se pose...

Lieu-dit le moulin, à Barret de Lioure

À Barret de Lioure, il y a un paysage frontal, vertical, intraversable,

que l'on ne peut physiquement que contourner. Je suis devant, sur la colline en face, et je dessine le champ triangulaire en bas.

En pente, il est sur le même massif que la colline à sa gauche, et fait pendant à la colline de droite.

Le "cirque" en haut, coeur au sommet crénelé de roches, est si vertical que les éboulis ont laissé tout son centre à nu.

Du haut, comme suspendues, s'égrènent quelques traînées de végétation,

boules en pointillés qui descendent dans le coeur vide.

Le coeur et le champs en bas sont comme en miroir, et entre les deux collines qui se font face gauche-droite,

une langue de terre s'avance, une autre recule, se frottent un peu, offrent un passage à double-sens...

Barret de Lioure est un paysage "figural". Ces passages, ces portes, cette organisation singulière de l'espace, due à la symétrie, à cette composition en étoile, présente un carrefour merveilleux...

où est le dedans, le dehors? où est le mâle, la femelle? où est le ciel, la terre?

Le ciel dans la terre comme un grand diaphragme.

La terre au ciel, périné épanoui et dentellé.

Interpénétration des orients.

Géographie anatomique, ou bien géographie intime, espace géologique qui prend la forme d'une naissance.

"L'origine du monde " de Courbet, une naissance, le mariage du ciel et de la terre. Il y a là une intense activité!...

J'ai dessiné de nombreuses fois ce lieu, l'arpentant avec mes crayons et pinceaux, cherchant le dialogue des formes qui font son espace singulier, cherchant la lumière qui ferait vivre l'espace, et sur des formats plus grands (jusqu'à 180x 90cm, lien vers encres...) en gardant l'essentiel de la forme....

Il y a un sentiment de spaciosité où la lumière est elle aussi inversée.

Il y a là une polysémie qui me tient depuis plus de dix ans!

2022 - 2023

Crozon

Mes yeux collent à leurs rides, ma main désire leurs mouvements, je m’absorbe dans les plis.

Quand la rencontre a lieu et trouve son rythme, c’est une fête !

Entre mes veines et celles de la montagne, ça chante, ça pulse, ça danse, je suis vivante !

La presqu’île de Crozon m’aimante par ses falaises qui jouent avec l’océan. Les mouvements de la roche me parlent de l’eau et du mouvement de toute chose. Ils me racontent une autre échelle de temps. Tous ces siècles m’invitent à la lenteur : se poser.

Sentir, dans une attention aigüe sur le fil du rasoir, dans cette ouverture où tout le corps pense : Sentir est l’état le plus sauvage de la pensée.

L’état le plus ancien du sauvage, les roches, éveillent ce désir en moi : sentir, jouer, trouver l’accord, laisser fluer.

Le corps de la montagne pense en moi, ma main l’écrit.

© 2024 Isabelle Baticle

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